Guy Roux: « L’Algérie avec un coach Espagnol, c’est incompatible »

L’ancien coach emblématique de l’AJ Auxerre, Guy Roux, que nous avons joint hier au téléphone a accepté de répondre à nos questions et nous parler de la situation actuelle de la sélection algérienne. Entretien.
Lors de l’émission «L’Equipe du soir» diffusée hier (lundi) sur la chaine L’Equipe, vous n’avez pas tari d’éloges sur le joueur algérien de Monaco, en l’occurrence, Rachid Ghezzal, allant même jusqu’à dire que vous regrettez qu’il n’ait pas choisi de jouer pour l’Equipe de France…
Oui, tout à fait. C’est vrai qu’il avait le choix, mais il n’est pas le seul. Il avait le droit de choisir l’Algérie et c’est ce qu’il a fait. Ghezzal est un grand joueur et oui, j’aurais aimé le voir jouer pour la France, c’est sûr. Il a joué pour l’Algérie, mais malheureusement pour lui, il ne jouera pas le prochain Mondial. D’ailleurs, ce que je trouve regrettable, c’est qu’avec tous les bons joueurs dont dispose la sélection algérienne, elle n’a pas réussi à se qualifier pour la Coupe du monde.
Justement, la non qualification de l’Algérie pour la Coupe du monde vous a-t-elle surpris ?
A vrai dire, je n’ai pas vraiment suivi le parcours de l’Algérie, mais c’est sûr qu’avec les joueurs dont elle dispose, c’est bizarre qu’elle ne se qualifie pas pour le prochain Mondial. Rappelez-moi les adversaires dont vous avez hérité…
Le Nigeria, le Cameroun et la Zambie…
Oui, voilà. Je trouve que l’Algérie s’est retrouvée dans un groupe ultra difficile. Le Nigeria dans le football a un potentiel très ancien avec des qualifications à la Coupe du monde et des joueurs de grande valeur. Taribo West que j’ai entrainé, mais aussi des joueurs comme Okocha. La Zambie a gagné la CAN 2012 et a dans ses rangs de très bons joueurs et le Cameroun, enfin, qui a remporté la dernière CAN et qui a l’habitude lui aussi de jouer des Coupes du monde. Ce n’était pas facile !
Justement, le Cameroun et l’Algérie vont s’affronter lors de la prochaine journée à Yaoundé. Comment voyez-vous cette partie sachant qu’elle est sans véritable enjeu ?
Ça sera un match sans importance, donc on ne peut pas s’attendre à une partie engagée des deux côtés. Ça sera comme une rencontre de préparation.
Beaucoup ne comprennent pas comment la sélection algérienne, avec tous les joueurs de renom dont elle dispose, peine collectivement à réaliser de bons résultats et cela depuis sa belle Coupe du monde au Brésil…
Il faut être dans le groupe pour faire une analyse objective et cibler les raisons de l’échec. Avoir de grands joueurs ne veut pas dire automatiquement avoir une bonne équipe au retour.
L’arrivée de Lucas Alcaraz à la tête de la sélection n’a rien changé…
Sur le choix du sélectionneur, il y a à redire. A mon avis, il faut respecter l’aspect culturel, c’est plus facile. Les Algériens sont de culture française et parlent pour la majorité le français. Donc, il est plus souhaitable que leur sélectionneur soit un Algérien, par exemple, un ancien joueur, ou un Français. Un sélectionneur espagnol ou allemand, il a plus de chances de passer à côté. Il n’arrivera pas à comprendre vos joueurs.
Alcaraz est vivement contesté, justement. Il pourrait être débarqué prochainement et on reparle de Courbis à la tête des Verts. Un coach que vous connaissez bien…
Courbis, c’est un phénomène. Il a entrainé en Algérie et connait bien la mentalité du joueur algérien. Je crois qu’il a gagné la coupe là-bas. C’est un homme qui va vous réussir un coup sur deux ou quatre ans.
Vous pensez alors qu’il correspond au profil ?
C’est un homme extrêmement intelligent. Il sait aussi collaborer avec les journalistes et cela est très important dans un pays comme l’Algérie où la ferveur autour du foot est énorme.
Récemment, il y a eu la venue en Algérie de François Blaquart qui s’est entretenu avec le président de la FAF sur la question de la formation. Sa venue a suscité une grosse polémique en raison de l’affaire des quotas. Qu’est-ce que vous en pensez ?
L’histoire des quotas, il n’en est pas responsable. Ça n’a pas été bien raconté. C’était un mot qui a échappé, c’est tout. Les quotas, il faut employer ce terme dans d’autres métiers. Ne le considérez pas comme responsable. Il était présent à la réunion, mais ce n’est pas lui qui a orchestré tout ça.
Pensez-vous qu’il puisse apporter au football algérien s’il accepte le poste de conseiller, que la fédération algérienne lui a proposé ?
Il a une grosse expérience et peut beaucoup apporter à la formation dans le football algérien. Vous savez, les rues et les places d’Alger jusqu’en 1960, c’étaient comme les places d’Auxerre. C’étaient des terrains de foot pour les gamins. Maintenant, tout ça, c’est fini. Les voitures sont partout. Ça ne joue plus dans la rue. C’est les clubs qui doivent former les joueurs. C’est là où Blaquart a fait un gros travail à la DTN française. En plus, c’est un homme sincère et droit. Pour la formation, c’est lui l’homme de la situation.

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