La loi Bahamas bientôt en vigueur? Quel avenir pour nos futurs bi-nationaux ?

Zvonimir Boban, secrétaire général adjoint de la FIFA, a fait part du désir de la FIFA de revenir sur la règle adoptée au congrès de Bahamas. Elle permet à un joueur qui a choisi une sélection en jeunes d’opter pour une autre sélection une fois la catégorie sénior atteinte. Retour sur l’épineux dossier du choix de la sélection nationale.
Le monde des sélections est une catégorie quelque peu spéciale du football. Si son niveau, tant tactique que technique, suscite régulièrement le débat, cette confrontation des nations déchaîne une passion rarement vue chez des joueurs dont l’attachement à leur club est, hélas, déclinant.
L’appel de la maison
Car si l’enfant d’un club peut préférer briller en terres étrangères, la sélection vient à rappeler aux brebis égarées l’appel et l’odeur de la patrie. Les rares exceptions de nationaux décevants voire rejetés par les leurs (Ribéry vient donner raison à l’adage qui veut que nul n’est prophète en son pays) ne contredisent évidemment pas un tel tableau.
C’est ainsi que l’on a pu voir Diego Maradona se muer en Che Guevara d’un jour lorsqu’il inscrit à la fois son plus beau et son plus légendaire but (l’un après avoir passé six joueurs, l’autre de la main) face à une Angleterre alors en grave tension avec l’Argentine sur fond de Malouines. D’autres, encore, se souviendront de la Guerre de Cent Heures qui mit en scène Salvador et Honduras et dont le match qui les opposait se solda par une élimination du Honduras et 3000 morts des deux côtés.
À n’en pas douter, le football réveille le nationalisme tout autant qu’il fédère un pays. Tel effet n’est évidemment pas pour déplaire aux dirigeants du monde entier puisqu’après tout, mieux vaut s’affronter sur un pré vert que sur un champ de bataille.
Ce bref rappel de l’intérêt du football de sélections s’avère nécessaire afin de comprendre les enjeux que soulèvent les discussions relatives à la “loi des Bahamas”. Elle permet, depuis son adoption en 2009, aux joueurs qui ont opté pour une sélection en jeunes de revenir sur leur choix une fois seniors.
Or, et il faut croire que le football n’est pas imperméable aux mutations géopolitiques qui l’entourent, ce modèle est désormais remis en cause. Zvonimir Boban, secrétaire général adjoint de la FIFA, a clairement fait part de son hostilité à cette règle, hostilité qui, semble-t-il, est partagée par Gianni Infantino.
«Nous sommes contre cette valse des sélections, un footballeur ou une footballeuse est avant tout un être humain, il a un cerveau, un vécu, une éducation civique et sait s’il est Français, Belge ou Sénégalais… Lorsqu’on porte un maillot national, il faut le faire par amour et choisir d’emblée le pays cher à son cœur», tels furent les mots de l’ancien international croate.
Il n’est guère nécessaire de s’intéresser à la faisabilité administrative d’un retour sur la loi de 2009. Les débats relatifs à la complexité d’admission d’une mesure au sein de l’Assemblée Générale de la FIFA sont secondaires. Ce qui importe réellement, c’est le fond d’une telle annonce.
L’Afrique : bénéficiaire mais aussi victime?

Premièrement, il semble nécessaire de rappeler que les principaux bénéficiaires de cette loi sont, évidemment, les pays africains. Ne pouvant former eux-mêmes l’ensemble de leurs joueurs au sein du pays, ils profitent du cadre de développement accordé à ceux qui sont nés de l’immigration.
Pourtant, et cela ne semble étrangement pas sauter à l’oeil des intéressés, les pays africains sont aussi victimes en première ligne de cette règle. S’ils bénéficient d’un rehaussement tactique de choix, ils ont aussi affaire à des mercenaires qui ne sont là que parce qu’ils n’ont pas eu accès à leur premier choix. Pour mémoire, cet article que nous vous proposions faisait suite aux propos de Benoît Assou-Ekotto et abordait cette question.
Un tel apport est supposé être ponctuel. Il permet aux sélections africaines de relever leur niveau dans l’attente d’un développement de leurs propres infrastructures qui leur permettra de ne plus dépendre de personne. Il n’existe pas de nation africaine qui se contente de pomper les talents pondus ici et là sans jamais tenter de développer son propre vivier national. Le Cap Vert, notamment, a pleinement profité de cette loi.